papyrural, Le blog d'Armand PAQUEREAU

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Une crise du logement se prépare…

Une crise du logement se prépare…

 

Sous le prétexte de dérèglement climatique, l’idéologie écologiste veut imposer une révolution brutale dans la rénovation et le confort des logements. Certes il est important d’économiser l’énergie, mais vouloir imposer des normes que les propriétaires, qu’ils soient occupants ou bailleurs, ne peuvent financer se traduit immanquablement par des effets délétères.

 

Un idéal ambitieux.

 

Les ventes de maisons neuves qui se sont effondrées de 31% en un an, et même 38% au 4ième trimestre 2022, en sont un symptôme flagrant. Les maisons passives qui ne consommaient pas plus d’énergie qu’elles n’en produisaient selon la norme RT 2012, doivent maintenant selon la norme RT 2020, devenir des maisons à énergie positive. Elles doivent produire plus d’énergie qu’elles n’en consomment.

Cela passe par l’implantation de panneaux photovoltaïques, l’installation de pompes à chaleur et de puits canadiens qui font grimper les factures de construction ou d’aménagement de manière astronomique. Encore faut-il que la situation de la maison le permette : pas de site classé dans le périmètre et une surface de jardin suffisante pour le puits canadien. Pour les pompes à chaleur, il ne faut pas de voisinage trop immédiat qui serait incommodé par le ronronnement du compresseur.

Se payer une maison à énergie positive est devenu un luxe que peu de personnes peuvent d’offrir dans un contexte économique très tendu et des perspectives fiscales préoccupantes (voir infra).*

 

Un marché locatif en berne.

 

De très nombreux propriétaires bailleurs ont par le passé investi dans l’immobilier locatif pour percevoir des loyers en complément de retraites souvent insuffisantes, voire dramatiquement basses.

L’augmentation du coût de construction des logements à énergie positive, aggravée par la mise en application de règles du Diagnostic de Performances Energétiques dissuade les investisseurs potentiels de se lancer dans l’immobilier. D’autant plus que les DPE favorisent l’énergie électrique dont la consommation est affectée d’un coefficient d’énergie primaire de 2,30. Cette astuce sémantique, appliquée depuis 2012, fait passer un logement de la catégorie C à la catégorie F.

Sachant que les logements classés G ne pourront plus être loués en 2025, F en 2028 et E en 2034, au vu des difficultés techniques, économiques et de rentabilisation hypothétique, on peut prévoir un abandon très important de l’investissement locatif et une crise de logement sans précédent au fur et à mesure de l’échéance de ces dates. La mise en conformité énergétique des logements existants se heurtant à des impossibilités techniques et financières, nombre de propriétaires se verront obligés de tenter de vendre à des prix de braderie, la non-conformité énergétique entraînant un effondrement des prix.

 

Les propriétaires occupants eux-mêmes impactés.

 

Si la mise en application des normes DPE semble ne pas affecter directement les propriétaires occupants, ils risquent fort de se trouver rattrapés par la réglementation.

En 2017, le ministre Hulot envisageait un malus applicable sur la taxe foncière. Cette idée a été reprise en 2020 par la convention citoyenne qui préconisait de l’imposer aux propriétaires bailleurs pour les obliger à rénover les logements. Cette mesure n’est pas encore entrée en application.

Cette mesure ne visait pas dans un premier temps les propriétaires occupants, mais la suppression de la taxe d’habitation incite le gouvernement à trouver des ressources de remplacement. Faire payer à ceux-ci les charges anciennement supportées par les locataires n’est pas une incitation à investir dans l’immobilier locatif.

France Stratégie avait même  envisagé en 2012 d’établir un revenu fictif imposable égal à la valeur du loyer dont profitait le propriétaire occupant son logement. Une taxe de cet ordre a existé entre 1914 et 1965 qui visait à rétablir une certaine égalité entre les locataires qui devaient régulièrement débourser de l’argent en pure perte pour se loger, contrairement aux propriétaires occupants. Cette mesure n’a pas (encore) vu le jour.

La valeur locative cadastrale correspond à un loyer annuel théorique que le propriétaire pourrait tirer du bien s’il était loué. Ce loyer est ensuite actualisé et revalorisé chaque année. L’abattement forfaitaire de 50 % permet de prendre en compte les frais de gestion, d'assurance, d'amortissement, d'entretien et de réparation. 

La loi de finances de 2021 a prévu une révision des valeurs locatives pour 2026. Ces valeurs locatives, dont le calcul initial date de1970 et est régulièrement réajusté par un coefficient annuel, servent d’assiette à la taxe foncière.

Déjà de nombreuses municipalités ont augmenté brusquement les taux des taxes foncières qui s’appliquent à la valeur locative des biens immobiliers pour tenter d’équilibrer leurs budgets amputés par la suppression de la taxe d’habitation.

La réévaluation de la valeur locative menée à titre expérimental dans cinq départements entre 2018 et 2019 a mis en évidence une augmentation de 10 à 25% des valeurs locatives. Cette augmentation, cumulée à celle des taux communaux, intercommunaux, GEMAPI, TEOM, va impacter les impositions foncières des propriétaires.

Si on reprend les taux pratiqués en 2021 dans le tableau de la DGFiP, les taux de prélèvement de la taxe foncière sur la valeur locative oscillent entre 83,20% et 21,40%, avec une moyenne 47,70 % en métropole et 68,70 % dans les DOM.

Si l’on reprend la définition de la doctrine de la valeur locative précitée, les municipalités pourraient taxer jusqu’à 87,2% la moitié de la valeur locative d’un bien immobilier. Ce qui se traduirait pour les propriétaires bailleurs par la confiscation de près de la moitié de leurs revenus locatifs, la moitié restante étant imposable sur le revenu et aux prélèvements sociaux de 17,2%.

Dans un contexte économique déjà tendu, on peut comprendre que les personnes qui envisageraient d’investir dans l’immobilier temporisent ou abandonnent.

 

Vers un démembrement de la propriété

 

L’Assemblée nationale a adopté le 28 novembre 2019 une proposition de loi qui vise à réduire le coût du foncier et à augmenter l’offre de logements accessibles aux Français. Cette loi vise à séparer le foncier bâti du sol sur lequel il est construit pour diminuer le coût d’achat initial. Ainsi, l’acquéreur devient propriétaire de l’immeuble, mais reste locataire du sol avec un loyer à long terme.

Cette loi est le premier palier d’application d’une réflexion menée en 2017 par France Stratégie, institution rattachée aux premiers ministres et prenant la suite du commissariat  général au plan (1945-2006) et du centre d’analyse stratégique (2006-2013). 

Cet organisme dont les orientations sont à prendre au sérieux, préconise dans sa note d’analyse N° 62 d’octobre 2017, page 9 :

« La soutenabilité d’une dette publique excessive pourrait être crédibilisée en rééquilibrant comptablement le bilan patrimonial de l’État, par la voie d’un transfert d’actifs depuis le bilan des agents économiques privés résidents, ce transfert étant assimilable à un impôt exceptionnel sur le capital. Concrètement, une façon de procéder consisterait en ce que l’État décrète qu’il devient copropriétaire de tous les terrains construits résidentiels, à hauteur d’une fraction fixée de leur valeur, et que ce nouveau droit de propriété est désormais incessible. En conséquence, l’État deviendrait créditeur d’une somme annuelle, correspondant à une part de la fraction de la rente immobilière associée à la copossession du terrain. Concrètement, cette rente immobilière elle-même équivaut à une partie du loyer qu’un propriétaire touche lorsqu’il loue son bien, celle qui relève de la rémunération du droit d’occupation du sol (actif non produit), l’autre partie correspondant au paiement par le locataire d’une consommation de service de logement, lié à l’occupation de la maison ou de l’appartement loué (actif produit).

Tout propriétaire, désormais redevable de cette somme à l’État, pourrait choisir de ne pas la payer. Dans ce cas, la fraction du terrain possédée par l’État augmenterait d’autant d’année en année. L’État récupèrerait alors la somme due lors de la première transaction qui interviendrait sur le bien immobilier, lors de la vente ou de la transmission à un héritier. Un changement de ce type, qui s’assimile donc à un alourdissement de la fiscalité sur l’immobilier ou sur les transmissions patrimoniales, ne se rajouterait pas purement et simplement aux montants d’impôts dus au titre des fiscalités préexistantes en la matière, car ces fiscalités s’appliqueraient à des montants imposables (valeur du patrimoine, revenus locatifs) »

 

L’immobilier, un investissement captif en danger.

 

Quand le Président Macron a transformé l’ISF en IFI, il savait bien que le patrimoine immobilier n’était pas délocalisable et que les propriétaires ne pouvaient que se soumettre à toutes les contraintes et taxations s’y rattachant. Une étude notariale montrait que 90% des personnes interrogées considéraient comme enthousiasmant l’achat d’un bien immobilier, 60% affirment être propriétaires de leur logement et 72% envisagent de l’être.  Le projet de France Stratégie leur était sans doute inconnu, de même que l’augmentation des valeurs locatives et des taxes foncières.

Si les propriétaires doivent demain payer en plus de la taxe foncière un loyer du sol, les moyens financiers pour entretenir les logements, voire les améliorer en résilience énergétique feront défaut.

Les propriétaires bailleurs tenteront de vendre au plus vite, et la baisse de valeur fera perdre au fisc des sommes conséquentes sur les droits de mutation.

Il est inquiétant dans un pays de voir dévaloriser le patrimoine pour préserver une capacité d’emprunter afin de distribuer des aides sans contrepartie. Le patrimoine immobilier a une vocation sociale incommensurable qui, déjà détériorée par l’obligation de mises aux normes énergétiques, va finir par perdre tout intérêt économique de rentabilité. La pénurie de logements est inéluctable.



10/03/2023
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