La mort est-elle dans le pré ?
Le reportage « La mort est dans le pré » (1) est un réquisitoire contre l’emploi de « pesticides » en agriculture qui sont présentés comme responsables des morts par cancer en agriculture. La réalité est toutefois beaucoup plus nuancée et mérite une analyse moins passionnelle et plus pragmatique.
Tout en respectant l’angoisse la souffrance des témoins qui s’expriment dans ce reportage, il convient d’analyser avec objectivité le sujet. Il est fortement suggéré que l’abandon total des produits chimiques apporte la garantie de bonne santé pour les agriculteurs et les consommateurs.
Or, on ne peut nier que, depuis 1946, (statistique INSEE) l’espérance de vie a augmenté de 20 ans, soit un tiers de vie en plus. Il est curieux de constater que cette augmentation correspond à la période où l’on a commencé à utiliser la chimie en agriculture. Certes, les « pesticides » comme leurs détracteurs les nomment, n’ont peut-être pas allongé la vie, mais il est évident qu’ils ne l’ont pas raccourcie et il faut reconnaître que le traitement des semences a éliminé l’ergot des céréales et les traitements fongicides protègent des fusarioses génératrices de mycotoxines (entre autres exemples).
Le reportage se focalise sur la profession agricole utilisatrice de produits dangereux, ce qui amène l’opinion publique à accuser les agriculteurs de pollueurs. Pourtant, il est prouvé que selon une étude INCA et DARES, l’agriculteur est le métier le moins exposé aux produits cancérigènes.
Il n’est fait allusion au rapport AGRICAN que pour dénoncer sa fiabilité au titre que la MSA et l’UIPP en sont financeurs. Or l’UIPP n’y participe que pour 5%. On peut tout de même supposer que la ligue contre le cancer, l’ANSES, la fondation de France, ECOPHYTO, l’ONEMA, et Uni Cancer Fondation François BACLESSE qui ont également financé sont des organismes sérieux pour garantir la fiabilité du protocole et des résultats, de même que les deux ministères qui ont apposé leurs logos.
Or ce rapport démontre que non seulement les agriculteurs sont moins malades que la cohorte témoin de population générale, mais qu’également ils présentent des taux de mortalité par cancer moindre de 30% en moyenne, sauf pour les myélomes chez les hommes et les mélanomes chez les femmes.
L’agriculture doit-elle bannir les « pesticides » ? Le voudrait-elle qu’elle ne le pourrait plus, pas plus que l’humanité ne pourrait cesser l’usage des médicaments.
Il se consomme en France 85 000 tonnes de médicaments (chiffres année 2014). Il a été utilisé en 2013 en France 60 200 tonnes de substances actives en agriculture. Seules des quantités infinitésimales de substances chimiques (LMR 1/100ème de Mg/Kg maxi) peuvent se retrouver dans la chaîne alimentaire alors que la totalité des médicaments est ingérée. Pourtant, seuls les agriculteurs sont accusés de pollution, quand des perturbateurs endocriniens issus de médicaments sont retrouvés dans les eaux de surface.
La solution de l’agriculture Bio semble séduisante, mais en Bio comme en conventionnel, il est impossible de ne pas protéger la récolte ou les animaux contre les prédateurs ou les maladies. A ce titre, la liste officielle des molécules autorisées en Bio en recense 57, commercialisées sous plus de 300 formulations. Il reste à prouver qu’un biocide d’origine naturelle est moins nocif qu’un biocide de synthèse.
En un demi-siècle, la part alimentaire dans le budget des ménages a été divisée par trois, l’augmentation de la population nécessite des rendements élevés sur des surfaces en réduction. Les agriculteurs n’ont eu que la mécanisation et la chimie pour répondre aux exigences de la population et de son augmentation.
L’agriculture Bio nécessite des conditions de climat, de terroir, de main d’œuvre spécifiques pour des rendements très inférieurs et ne peut être généralisée dans le contexte des prix actuellement consentis aux denrées agricoles. Si l’agriculture Bio rémunérait suffisamment l’agriculteur, tous s’y précipiteraient.
Considérant qu’en 2015, 30% des agriculteurs n’avaient que 354€ par mois de revenu, et qu’en 2016 ce pourcentage est monté à 50%, on voudrait les obliger à arracher les chardons à la main et à ramasser les doryphores dans un seau sur des surfaces individuellement importantes.
Continuez à dénigrer les agriculteurs, et demain vous n’aurez que des denrées alimentaires importées, dont vous ne saurez pas comment elles auront été produites, et dont le déséquilibre de notre balance commerciale ne nous permettra plus l’accès.
Permettez-moi de terminer par une anecdote :
Deux hommes préhistoriques devisent, assis devant leur grotte :
« Quelque chose n’est pas juste ; notre air est propre, notre eau est pure, nous faisons tous beaucoup d’exercice, tout ce que nous mangeons est Bio et élevé en plein air, et malgré cela personne ne vit plus de trente ans »
Armand PAQUEREAU
09 09 2017
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